La dysmorphophobie et la formation du symptôme

 

La dysmorphophobie[1] et la formation du symptôme[2]

 

L’identification au trait : Les yeux de cochon

 

Mlle M. ressemble étrangement à sa mère. Elle pourrait même être sa jumelle, de vingt ans sa cadette. Cette étrangeté, plutôt inquiétante, dont elle ne parle pas, laisse place à une Autre parole.

 

« C’est comme s’il me manquait un organe vital et qu’il fallait qu’on me le greffe pour continuer à vivre.[3] Pour moi, me maquiller le soir c’est pour protéger mon ami, qu’il ne me voit pas sans le maquillage le matin – pour lui éviter d’avoir peur, pour lui éviter l’horreur.[4] C’est comme pour un bébé à qui on met une couche le soir pour qu’il n’ait pas fait pipi le matin.… Quand mes yeux ne sont pas maquillés ils sont trop petits pour mon visage. C’est comme une anomalie, une malformation, comme s’ils n’étaient pas terminés…c’est comme s’ils n’étaient que des orifices. »

 

Cette jeune femme, plutôt jolie, que nous allons appeler Mlle M se lève tous les jours à cinq heures du matin pour se maquiller, notamment les yeux et la bouche. Le premier diagnostic en psychiatrie était la schizophrénie. En effet, la plainte au niveau du corps retient l’attention du clinicien par le poids envahissant de cette préoccupation angoissante pour le sujet lui-même.

 

Cependant, dans cet étalage d’organes, est-ce que  Mlle. M. ne décrit pas l’horreur du réel ? Elle parle d’un manque, qui, en relation avec l’image spéculaire, nous interroge. Qu’est-ce que ce manque qui apparaît chez un sujet envahi par des sentiments de négativisme et de dépersonnalisation et dont l’image correspond à quelque chose de non terminé, de presque inhumain ? Mlle. M. envisage même de se faire tatouer pour souligner sa bouche et ses yeux. Ce tatouage comblerait peut-être ce dont elle pense manquer. Un jour elle s’est faite même une petite entaille avec un canif sur la joue pour « ajouter une belle marque », « peut-être pour attirer l’attention des gens ». Cette marque est très discrète et disparaît lorsqu’elle est maquillée. Or il introduit sur une surface où l’image tend à se déformer une différenciation avec le réel. Pourrait-on dire que ce marque introduit un « Un » qui la différencie aussi de sa mère et la fait glisser dans une dimension temporelle ? La geste de s’infliger une cicatrice, une laideur pour ainsi dire, ne consigne-t-elle pas le sujet à une fonction du temps ?[5] Cette marque n’inscrit-elle pas le sujet ainsi dans les générations ?  L’identification à l’image ne serait-elle pas une forme de déguisement sous lequel se dissimule une identité au même ? L’identification, l’arrachage de l’image du réel, se fait péniblement chez cette patiente par des voies qui retiennent quelque chose d’une signification. L’identification n’est pas le fait de ressembler physiquement à un parent ou à l’autre. Elle est le fait d’adopter un masque. Elle s’accomplit par la parole.

 

Les yeux, la bouche sans maquillage, de Mlle. M., lui paraissent n’être que des orifices, une anomalie à cerner. Cette étrangeté, ne signale-t-elle pas la présence de l’objet a dans le champ spéculaire ? Maupassant décrit admirablement comment il tente de ‘cerner’ par l’écriture, le miroir vide jusqu’à ce qu’il voit réapparaître son image.[6]. D’après les commentaires de Lacan nous pouvons penser que ce retour de l’objet adans l’image chez Maupassant qui correspond au sentiment de double signale un bouleversement de la place de l’Autre dans le schéma du bouquet inversé. Qu’en est il du miroir chez Mlle. M. ?

 

Résumons le développement de l'identification au stade du miroir dans la « Remarque sur le rapport de Daniel Lagache », où Lacan modifie le schéma du bouquet renversé de Bouasse pour expliquer non seulement ce qui est illusoire dans la réalité du sujet et le développement des tendances constitutives du monde mais aussi pour distinguer les différents niveaux de narcissisme.

 

Le premier niveau se rapporte à l'image corporelle indiquée dans le modèle par la réflexion dans le miroir sphérique. Ce modèle définit assez bien le peu d'accès qu'a le sujet à son corps, qu'il  imagine comme un gant qu'on puisse retourner. [7] Le sujet à ce stade donne sa propre forme à son Umwelt, le monde ambiant, et il sera à l'origine du moi idéal (Idaelich), i(a) dans le schéma.

 

Au deuxième niveau du narcissisme se situe l'idéal du moi (Ich idéal), i'(a) dans le schéma. Il s'agit d'une identification narcissique à l'autre, le semblable. La place de cette instance se situe au niveau du miroir plan. L’accès définitif à i'(a) se résout en un constant transitivisme. Dans le schéma, figure 3, [8] cette notion est figurée par le miroir A qui peut basculer jusqu'à 180 degrés. Ainsi la position de l'Autre imaginaire peut être altérée, voire effacée transformant alors l'image du sujet. C’est cette position de l’Autre imaginaire qui est altérée chez Mlle. M., entraînant l’anamorphose ainsi que la dysmorphophobie.

 

L'intérêt premier de ce raisonnement pour nous est la figuration de la place de l'Autre mais aussi la démonstration de comment, lors d’une analyse, la position du miroir peut être en quelque sorte modifiée, laissant découvrir l’objet a. La découverte importune de l’objet a aura comme effet la dysmorphophobie, ou quelque chose d’approchant. Il est parfois nécessaire à cet instant de la cure que l’analyste retrouve sa position d’écran.[9] C’est de cette place qu’il peut reconnaître « au minimum » ce qui est de l’événementiel dans la vie du sujet et sans suggestion, ni interprétation, continuer à fournir un support pour le sujet à l’élaboration de son propre discours et de son image.

 

Mlle M. s’avoue s’insulter parfois devant le miroir en se traitant de libertine. Elle s’accuse de libertinage. En outre, elle dit que sans maquillage ses yeux sont comme ceux d’un cochon:

 

« Si je ne suis pas fardée je préfère me cacher, j’ai des yeux de petit cochon. Surtout si l’on me regarde. Puis je me dis ce n’est pas moi sans maquillage. Ce n’est pas une personne. Et je veux voir. Il m’arrive de m’insulter devant le miroir, pour les sorties, le libertinage. »

 

Cette manière de s’insulter devant le miroir pouvait être considérée comme trait différentiel pour la détermination d’une psychose si pris isolément. En effet, l'injure adressée à soi-même devant le miroir se remarque très souvent comme trait fort de la psychose chronique hallucinatoire, forme de paranoïa, selon Lacan. [10]Cependant, des yeux de petit cochon sont des signifiants qui forment un trait qui n’est pas seulement à mettre en lien avec une identification au signifiant maître (einziger Zug) mais ils sont aussi des signifiants qui permettent l’accrochage de ce sentiment de honte, le sentiment de cette jeune femme d’être embarrassée par un comportement paternel qu’elle se sent obligée de perpétuer sous son propre chef comme pour éprouver sa propre valeur et pour soutenir la fonction phallique.

 

Pouvons nous paraphraser des remarques de Lacan par rapport à l’écriture[11] en les rapportant ici à l’image : Ce qui reste, c’est le signifiant. L’image reflète quelque chose sur laquelle on peut accrocher des signifiants. Et comment les accroche-t-on, ces signifiants ? Par l’intermédiaire de la disposition du sujet de prendre distance de la vérité de sa parole par le biais de la fiction, ou de l’imaginaire. On peut relever cette tendance dans le mensonge, le mi-dire, dans tout ce qui dans le dire n’est pas forcement vrai et qui donne support à un nouage entre le réel, le symbolique et l’imaginaire. L’accrochage de ces signifiants permette au sujet de s’écarter du réel du regard par l’intermédiaire de la parole et d’une identification avec la faille de l’Autre.

 

L’identification avec la faille paternelle

 

L’Autre est nécessaire pour que l'identification soit acquise. En effet, c'est par le regard de l'Autre, initialement la mère, que l'image dans le miroir prend son sens. Ce regard, on ne peut que l’interpréter d’après les dires de Mlle M. Pour elle, le regard de sa mère semble être celui d’une mère insatisfaite. C’est un regard rivé sur un horizon lointain, préoccupé par des « cochonneries » que raconte son mari, presque comme si elle pouvait les voir. Ce regard ne s’arrête pas assez sur l’enfant pour le fixerdans le présent, dans le temps. Or, on aurait tort de croire que le grand Autre du discours peut être absent de la distance prise par le sujet dans sa relation au petit autre. L'Autre, en l’occurrence le père, ne prend pas cette place, s’il n’intervient pas dans la relation spéculaire.[12]

 

Le portrait que Mlle. M. fait de ses yeux non maquillés nous indique non seulement comment ses organes sont investis d’une qualité phallique, mais aussi quel usage Mlle M. fait du maquillage. D’un côté elle dissimule une qualité animalesque, en transformant la gueule dévoratrice en bouche féminine, et de l’autre, elle démentit cette même dimension.[13]. Est-ce que la description de ses yeux comme trop petits, non terminéspourrait faire écho à la déception de la petite fille devant la prise en compte non seulement de sa castration mais du clitoris comme organe inférieur à celui du garçon ? S’il est difficile pour la petite fille de dénier l’existence de la castration sans qu’on pense à la psychose, le manque de pénis chez cette dernière ne l’épargne pas du désir de donner l’équivalent du phallus à sa mère, tout comme le petit garçon, d’après l’article de Freud sur la sexualité féminine.[14]  En effet, le trait paternel du « cochon » n‘est ni seulement celui d’adopter une gueule d’animal ni d’être marqué par des « cochonneries ». Il voile une certaineimpuissance paternelle. Et c’est bien à partir de cette problématique de puissance paternelle qui introduit pour Mlle. M. un élément quaternaire qui illustre la névrose.

 

« La stérilité a déclenché le divorce de mes parents. J’ai essayé de résister. Je me suis mariée pour rassurer mon mari en vue d'une adoption. J'ai eu des malaises. Au bout de trois ans c’est ma mère qui est venue me chercher et a dit que je devais divorcer. Je sortais beaucoup. Mais j’avais toujours ce malaise, ce malaise à être… »»

 

Mlle M. semble se plaindre du fait que son organe à elle n’est qu’un trou, un orifice, incapable de satisfaire sa mère qui n’est pas non plus satisfaite par son mari. Le père de Mlle. M. n’est pas impuissant quant à sa position de virilité[15] mais il l’est au sens qu’il ne peut pas satisfaire sa femme en lui donnant l’enfant qu’elle lui réclame. Cependant, nous pourrions justement se demander comment Mlle M. se mue pour faire coïncider à cet enfant à celui désiré par sa mère ? Est-ce que c’est un enfant, un nouveau sujet, qui ressemblerait aussi au père, ou un enfant qui ne grandirait pas, qui ne resterait toujours qu’en position de satisfaire la mère ?

 

Cette position de satisfaire la mère est déjà bien moins claire qu’elle semblerait à première vue. Une signification surgit à partir d’une série d’associations avec ce malaise: excréments, petits yeux, petit cochon. Cette signification semble concerner celle du malaise à être la fille née d’un couple discordant, se croyant stérile, avec un père libertin de surcroît. Elle reste marquée d’une sorte d’anomalie, pour ne pas dire d’infamie, malgré la tentative d’une réduction à l’objet que nous pouvons croire faite par la mise en série des objets marqués d’abord par une sorte d’interdiction.[16] Est-ce que les dires concernant cette marque, cette « anomalie » est le substitut de l’expression fantasmatique d« être châtré par le père » [17]? Ou est-ce que cette expression participe à une forme de démenti de la castration maternelle, une sorte de résidu de croyance infantile au phallus de la mère ?

 

Alors qu’un manque ou anomalie au niveau de l’absence d’organe ne peut être constatée qu’en référence au signifiant phallique, qu’en est-il au niveau du visage ? Le visage, ne doit-il pas comporter des traces du temps ? Nous pouvons être tentés ici de substituer une interprétation mythologique à celles qui se sont faites connaître par la psychanalyse. Le Dieu Grec, Kronos, n’était-il pas aussi bien le gardien de la Fertilité aussi bien que celui du temps ? Nous pensons ici au Saturne de Goya, choisi pour illustrer La Chose en couverture de la publication du Séminaire sur la relation d’objet de Lacan. Ce tableau, décrit remarquablement par Murielle Gagnebin, semble tout à fait approprié pour décrire l’ambivalence que Mlle. M. retient de la relation primitive : « Il s’agit de montrer comment le temps domine l’univers tout entier. Quant à savoir quel genre de domination le Temps exerce sur nos vies, il n’est pas besoin de s’interroger longuement. La violence démentielle avec laquelle Kronos empoigne l’enfant qu’il engloutit parle pour elle-même….On dirait qu’afin de moins souffrir, l’enfant raidit sa musculature. Tout sanguinolant, le petit homme, réduit à la simple verticale de son corps, ressemble à un phallus géant. Aussi bien peut-on assimiler le geste de Kronos à un geste d’auto-satisfaction érotique. On remarquera que Kronos est dépourvu de tout membre viril. En accordant au géant ce phallus de substitution, Goya insiste donc certainement sur la jouissance quasi sexuelle qu’éprouve Kronos à dévorer sa propre chair. »[18] En effet, c’est ce rapport au phallus comme objet à satisfaire la mère qu’il convient à identifier pour préciser la structure de cette patiente en vu de la direction de la cure.

 

«  J’ai peur de mon vrai visage. Je ne supporte pas cette personne, le visage quoi, les yeux. Je m’angoisse, je hurle. Des cris primitifs. J’ai peur qu’on me prenne pour un animal. Un animal féroce. J’aurais tendance à être plutôt calme. Ma mère disait que j’étais plutôt calme. »

 

Se reconnaissant sous les traits du père, impuissante à son tour, Mlle M. a peur de décevoir sa mère. Elle voudrait être plus féroce, plus phallique, pousser un cri digne de ce nom. Peut-être pouvons nous apercevoir sous ces traits l’intérêt du mi-dire, du masque, du maquillage comme un indice féminin à montrer ce qu’elle n’a pas. Mlle M. ne veut pas que sa mère souffre ni de sa férocité (son avidité sexuelle indiqué par les termes : « cochon, libertine »), ni de son effacement (l’enfant biffé, non né, forclos). Elle fait appel au père réel qui n’arrive pas à faire limite à cette mère. Dans un premier temps, il ne reste plus à Mlle M. qu’à s’identifier au trait qui identifie son père à travers ses yeux cochon. De cette manière  le père réel, sous sa forme  primitive, castratrice, peut intervenir pour rétablir déjà une triangulation : mère, phallus, enfant. Comment trouvons nous alors la trace du père réel ?

 

Il est tout d’abord surprenant pour nous de noter l’allitération et la répétition du signifiant age[19] qui revient dans ses propos en relation avec l’image. Or la répétition, même du trait unaire, ne signe aucune structure. Ce signifiant revient en relation avec quelque chose qui manque, qu’elle pense devoir se faire greffer, tout comme un organe. Elle ne parle pas de son age, puisqu’un vide dans la chaîne parlée permet à un signifiant de venir à la place d’un autre. On pourrait objecter et ne pas vouloir prendre en compte la répétition du phonème ici, fréquent par ailleurs dans la langue française. Or n’est-ce pas la répétition (même d’un phonème), l’élément princeps de ce qui se situe au-delà du principe de plaisir comme valeur d’oracle dans la psychanalyse ? La présence des processus premiers d’un mécanisme inconscient de déplacement est certainement responsable de la fréquence de ce signifiant. Or il y a toujours une polysémie d’éléments qui vient donner des significations nouvelles. Ici, il y a non-coïncidence des signifiants, l’établissement d’un vide, qui permet la dimension de la métaphore, et l’image. Nous pouvons cependant nous demander comment ce signifiant refoulé se conjugue avec sa représentation et comment ce processus se déroule à l’insu du patient.

 

Ce même processus, au travers duquel nous pouvons comprendre l’effet de la castration sur la subjectivation se présente également chez l’Homme aux loups dont le symptôme dit hypochondriaque a longtemps interrogé les psychanalystes. Le fonctionnement névrotique de métaphorisation peut être illustré très simplement par l’analyse du rêve de guêpe cité par Freud. Le récit du rêve par l’Homme aux loups démontre comment les mots eux-mêmes subissent les effets de lésion symbolique, et comment ces lésions peuvent illustrer le fonctionnement symbolique au niveau du symptôme et au niveau de la subjectivation même :

 

« ‘ Espe‘ ? Me fallut-il demander, qu’entendez-vous par là ? – ‘Eh bien’, répondit l’Homme aux loups –‘ l’insecte avec des rayures jaunes sur le corps, qui peut piquer.’ ’ Vous voulez dire une Wespe’ (guêpe en français) lui répond Freud.  Cela s’appelle-t-il Wespe ? J’ai effectivement crû que cela s’appelait Espe‘. » [20]

 

Lapsus, mot d’esprit ou néologisme ? Die Espe veut dire : le tremble en allemand. Freud en retient « une action symptomatique », conséquence d’une « compréhension ultérieure », après coup donc, de la menace de castration proférée par sa bonne d’enfant, Grouscha, qui se rapporte en définitive pour Freud à l’identification avec sa mère lors de la scène originaire. Or, la conséquence de cette élision de la lettre sous transfert est d’autant plus étonnante qu’elle produit un signifiant reconnu tout de suite par le sujet comme celui qui représente un sujet pour un autre signifiant : S.P., les initiales de son nom : Serguei Pankajeff, $.

 

Cette élision nous intéresse ici pour quatre raisons : 1) parce qu’elle représente un résidu du réel retrouvé dans la langue,  comme réel concernant le rapport sexuel, 2) parce que Lacan l’a remarquée comme oubli, comme effet de subversion du sujet,[21] 3) parce qu’elle illustre la fonction phallique dans sa formalisation par Lacan et 4) parce qu’il semble pertinent de réfléchir sur l’opportunité de son utilisation comme paradigme pour un diagnostic différentiel.

 

La question du réel du rapport sexuel rencontré dans le langage de l’Homme aux loups constitue une thèse non développée ici par Freud. Il se contente de l’inclure dans le tableau clinique des manifestations symptomatiques en tant que « Wespemutilée », signe de la scène réelle qui fait trauma chez l’Homme aux loups : l’observation de l’acte sexuel de ses parents et particulièrement la vue de l’organe sexuel de la mère, « mutilée », également, aux yeux de l’Homme aux loups. Freud avait pourtant, dès 1898, repéré dans l’oubli des noms l’effet de la mort et de la sexualité. [22] Freud insiste dans son cas de l’Homme aux loups sur la « prise de position initiale » de son patient « envers le problème de la castration ».[23]

 

Or, Lacan défini la fonction phallique[24] après le mathématicien Frege : Φ(x) où Φ représente le constant phallique, et x représente le sujet. L’x, ou le variable  ici correspond au Espe (le S.P. des initiales du nom) mais aussi au symptôme (rêve de la guêpe mutilée, dont les ailles sont une figuration du signifié de la lettre W). Ce signifiant, Espe,permet l’articulation de la fonction phallique et le symptôme. Le signifiant W qui revient dans le rêve correspond à la part refoulé, le sujet dans son articulation à sa vérité de l’être. Le refoulement de ce signifiant primordial, qui s’est manifesté sous une autre forme dans le rêve des loups (Wolf), correspond à ce qui détermine la structure du sujet. Si ce signifiant qui s’articule aussi au Nom du père est forclos, d’après la définition lacanienne, le sujet sera de structure psychotique. Dans le cas de l’Homme aux loups, malgré un quiproquo sémantique inscrit à partir de l’usage du terme freudien Verwerfung, pour définir la structure de la psychose par Lacan, il paraît clair que la fonction phallique est opérante pour ce sujet, au moins à partir de ce rêve. D’après cette deuxième définition de Lacan, l’Homme aux loups serait plutôt de structure névrotique.[25] Ainsi, nous établissons la distinction entre la fonction phallique et son articulation avec le symptôme.

 

Comme pour l’Homme aux loups, cet x qui représente le sujet pour un autre signifiant (le S.P. pour l’Homme aux loups), la valeur représentée, refoulée, occultée en dernier lieu par la couche (Couche de bébé, couche de maquillage) est fait des objets de jouissance maternelle : « excréments » du bébé, « petits yeux » de cochon, objets interdits. Leur rapport avec les signifiants concernant le père, portés par la parole de la mère, montre en quoi ces valeurs tombent sous la domination de la fonction phallique. Pour ce qui concerne le sujet, la sexuation est clairement centrée sur le phallus ainsi que sa déception de pas l’avoir. Malgré sa connotation de mauvais (libertin, cochon), Mlle. M. ne renonce pas à sa revendication. Il y a pourtant comme un désir de masquer son manque, de masquer avec lui la faille paternelle, comme si par ce moyen elle pouvait contourner l’ambivalence  maternelle.

 

Rappelons que Mlle. M. n’a pas fuit son mari stérile. Sa mère est venue imposer sa loi à elle. Cette jeune femme n’a pas adopté la position de sa mère d’être ravagée par un homme qui non seulement était infidèle mais racontait ses exploits à sa femme. Mlle M. la plaint, mais soutient qu’elle-même est exécrable dans la relation à son ami. Elle dit adorerson compagnon. Est-ce qu’elle parle là de l’amour, de l’idolâtrie, du désir ? Elle semble désirée le phallus, comme une femme. Se mue-t-elle en homme pour être désiré comme une femme (position hystérique) ? Face à son idéal de perfection phallique, devant un homme, son moi viril est renvoyé à une position d’avidité (cochon, libertin, positions désirantes, féminisées malgré leur identification avec le père). Cette position d’avidité contraste avec la plénitude phallique de plusieurs manières. Elle évoque une image de laideur qui se trouve complémentée par les versants moraux d’infamie, de honte et de mal.

 

Ces idées trouvent vraisemblablement leur origine dans le discours maternel. La mère  de Mlle. M. s’est plainte d’avoir dû supporter un homme, que sa fille décrit d’ailleurs, comme étant « un libertin ». Mlle M. exprime fortement son dégoût sexuel, ainsi que ses griefs contre son père et ce dernier « faisait avec ses maîtresses». Ces faits sont rapportés par sa mère. « J’ai trouvé ça répugnant. Ma mère a été écœurée». Dans une impossibilité d’identification hystérique à sa mère comme autre femme idéalisée, comme Dora a pu faire avec Mme. K., Mlle M. ne peut trouver l’idoleque par l’image que la couche de  maquillage permet de construire.

 

Comme l’Homme aux loups associe le trou dans son nez et le voile à l’Autre, Mlle. M. associe elle-même la couche de maquillage avec la couchedu bébé, sans redoubler le signifiant. Dans chaque situation cette couche est une couche protectrice hors corpspour protéger l’Autre, en l’occurrence sa mère, contre les excréments, contre l’outrage, contre le retour de l’objet a. Le signifiant age  revient dans la parole comme le W de l’Homme aux loups. C’est-à-dire comme lettre qui signe le réel du rapport sexuel. Le maquillage intervient tout d’abord d’une manière quasi-hallucinatoire. Comme le signifiant W, puis le V, chez l’Homme aux loups qui fait irruption comme voile, nous pouvons penser qu’elle doit sa place à l’intimité qu’elle procure comme signifiant auprès de l’Autre. Cependant, plus que la lettre accrochée à l’image, ce signifiant intervient comme chez l’Homme aux loups, pour faire tiers,  écran préalable à tout refoulement,  maintenant un vide.

 

En filigrane nous retrouvons les associations : litige de la mère signalé par l’emploi des signifiants concernant le mariage de celle-ci, de sa stérilité, de son écœurement et de son mari libertin(père de notre patient), cochon, petits yeux…avec lesquels Mlle M. se met elle-même en série. Cette mise en série du sujet avec les signifiés par le biais de l’association des signifiants ressemble un peu au chiffrage qu’on reconnaît chez l’Homme aux loups en association avec la lettre V ou double V. Chez Mlle M., ces signifiants homophones : mariage, visage, maquillage, tatouage, libertinage, forment un cadre, un cadre qui délimite un espace où Mlle M. peut presque se voir, et semble signer une structure où la pulsion est désormais limitée. C’est une extériorisation du signifiant qui ne fait pas corps mais qui construit ou qui maintient un vide.

 

La répétition des signifiants homophones rappelle surtout une autre homophonie, l’homonymie de son nom et celui de son père – leur nom de famille. En effet, si nous mentionnons ce fait nous remarquons par là l’appui phallique et son articulation avec la langue qui peut intervenir dans toutes les structures. Bien que le nom de famille, le nom du père n’est pas la métaphore du Nom-du-père, nous pourrions remarquer que l’homonymie des noms d’une même famille est déjà une forme de répétition par laquelle peuvent se nouer certains symptômes. Chez Mlle M. , ce n’est pas par l’homonymie mais par l’identification avec la faille du père, et en particulier comment cette faille le nomme lui, le père, pour construire la métaphore. Nous retrouvons la marque de cette faille du père dans les associations homophones que fait Mlle M. et par laquelle elle échappe à un pur transitivisme.

 

Rappelons comment fonctionne le « transitivisme », dans le rapport de captation avec les autres enfants du même âge. Ce n’est pas une simple contiguïté avec sa propre image, il y a un rapport à une tierce personne chez Mlle. M., en l’occurrence, sa mère.

 

Considérons la notion d’un  double transitivisme qui va nous aider à distinguer la schizophrénie des névroses (narcissiques et de transfert). Winnicott s’intéresse au rôle de la mère et de la famille dans le processus de structuration chez l’enfant. Pour lui, le précurseur du miroir est le visage de la mère. Si devant la réflexion de l’infans alors portée par sa mère, celle-ci ne répond pas avec son regard et sa voix, le miroir devient « une chose qu’on regarde, mais dans laquelle on n’a pas à se regarder. » [26] Dans la névrose narcissique, le visage conditionne l’identification de l’infans au reflet du miroir à titre de symbole métonymique de l’espèce.[27]

 

Cette notion de symbole métonymique de l’espèce est déjà plus précise que celle offerte par Freud, où l’enfant semble se situer simplementparmi les objets séparables. L’enfant doit se situer dans une lignée de semblables articulant l’image avec les signifiants des coordonnés parentaux. Cette forme d’identification n’est pas encore celle qui détermine le sujet divisé. Nous remarquons cependant déjà un point différentiel sur les mécanismes narcissiques mis en jeu. La mise en série des signifiants suffit pour créer une forme d’identité mais non une identification à l’espèce. Une identification des signifiés grâce à la coordination de leurs signifiants permet cette identification au semblable. Si parmi les trois frères on trouve Paul, Ernest et moi, les trois prénoms ainsi que le nom frère, arrimés  avec le signifié relationnel suffisent pour que le sujet s’identifie au semblable. Mais il faut encore qu’une absence, qu’un vide s’inscrive dans cette série à l’endroit du renoncement pulsionnel avant qu’une véritable identification du sujet puisse avoir lieu. Plus qu’un rapport à la grammaire, le refoulement participe à un travail de logique pour le sujet en devenir.

 

On imagine le déplacement du regard de la mère sur l’image spéculaire où le regard de l’infansreflet de celui de la mère. Il s’agit d’une double transitivité.[28] La transitivité de l’infans, venant de l’assimilation au modèle de l’espèce peut, nous venons de le constater, être précisée par le déploiement de langage et l’accommodation du regard de la mère. La mère capte le regard encore errant de l’infans qui renvoie à l’imago sous-jacent de cette même image. [29]  De cette manière, l’appropriation de l’image ne se fait que parce qu’il y a un arrimage des signifiants de la mère avec les signifiants parentaux ayant déjà laissé leur empreinte. Cette coordination des signifiants et du regard vient se capitonner avec le signifié du regard de l’infans, son image (comme semblable mais aussi comme phallus de la mère) ainsi que le signifié du regard de la mère. La mère doit reconnaître, en ce sens non seulement l’infanscomme étant le sien mais l’image dans le miroir comme étant celle de l’infans. L’enfant portera ainsi la trace des traits que sa mère lui accorde mais ce regard sera médiatisé par l’écran de l’image en miroir. 

 

L’infans, tenu dans les bras de sa mère, se tourne vers celle-ci et dans un rapport de jubilation transitiviste capte son regard dans une « Gestalt maternelle ».Au niveau de l’imprégnation de l’espèce, la coloration affective qu’expriment non seulement les traits du visage de la mère mais aussi sa voix (la tonalité et les signifiants), est d’une importance capitale. Elle conditionne l’implication de l’infans dans l’opération spéculaire, de même que les caractères plus ou moins satisfaisants sur lesquels s’édifiera son image[30] Cette coloration se fonde sur les signifiants qui, pour une reconnaissance de l’image en miroir, se capitonnent sur le signifié du regard. 

 

Nous remarquons ici une différence majeure avec le transitivisme schizophrène. L’image du névrosé (narcissique et de transfert) est édifiée sur des caractères décryptés de ce transitivisme et porte la marque d’une tonalité affective dont le regard maternel se trouve habité. [31] Cette image l’aliène vers une extériorité qui la pousse vers la recherche de son double et, ce, au moins pour notre patiente, Mlle M., dans le même instant et par le même regard qui l’abhorre en tant qu’objet exécrable. Le maquillage (la couche) dont elle a tellement l’urgence, sert à récréer une situation triangulaire mère-objet-enfant.[32]Le miroir intervient pour garantir la séparation avec la Chose. Il garde ainsi son aspect de tiers, de même dans cette séance de  l’Homme aux loups où l’angoisse croissante face au V de la pendule est atténuée par cet échange de regards avec Freud, tiers devenu objet écran ou avant corps, si nous suivons Stekel, deuxième dissident de Freud.

 

Stekel envisage que le rôle de l’analyste comme Autre constitue, par le transfert, une sorte d’avant corps affectif. Stekel, pourtant perspicace quant à la transitivité du regard et sa fonction première de barrière,[33] ne reconnaît cependant pas que le transfert est un dernier rempart chez les patients avant la rencontre avec une vérité trop crue.[34] A défaut d’une image satisfaisante, certains sujets essaient de reconstruire un « avant corps ». Pendant des périodes de crise, ils ne peuvent aborder leur image que par le rêve et l’équivoque, tout en s’activant devant le miroir avant les séances de l’analyste. Il manque en effet le tissage nécessaire entre le regard, l’Autre et le langage.

 

En effet, l’expression de Stekel semble avoir un sens très proche de celle de Freud concernant la projection dans le deuxième topique. « Le moi est avant tout un moi corporel, il n’est pas seulement un être de surface mais il est, lui-même, la projection d’une surface».[35]On comprend alors comment les post-freudiennes ont pu, à l’instar de Stekel, saisir de cette expression pour développer la place de l’analyste dans une sorte de fonction propédeutique du moi. Néanmoins, si nous nous rappelons également le mécanisme de défense privilégié de la paranoïa, nous pouvons mieux comprendre combien cet échange de regards, au cours d’une séance, a de l’importance chez l’Homme aux loups. Au moment où Freud ne joue plus le rôle de tiers avant corps, l’Homme aux loups s’en prend à sa peau et s’abandonne dans une image qui le pousse vers une projection de type paranoïaque.[36]

 

Mlle M. présente également de nombreux traits mélancoliques dans son attitude à s’identifier à l’objet a. Déjà dans le geste de se maquiller et de se démaquiller sans cesse, chez ces sujets, nous trouvons quelque chose d’une forme de démenti de la réalitéde la castration, également différente de la forclusion lacanienne ou du Verleugnungfreudien dans la structure perverse. Ce qui est démenti semble être justement ce rapport à la mère et particulièrement au phallus de la mère. Or, il n’est pas question d’un fétiche ici, en tout cas, pas pour le sujet. L’image des « yeux de petit cochon est plus « l’objet phobique  en tant que signifiant à tout faire pour suppléer au manque de l’Autre, » que « le fétiche fondamental de toute perversion en tant qu’objet aperçu dans la coupure du signifiant. »[37]

 

On peut penser que la frustration imaginaire, d’un objet réel, condamne le sujet narcissique à entrevoir la réalité comme la conséquence manifeste de ce qu’il a déjà vécu. Cette frustration revêt le sceau de la castration symbolique et de son caractère absolu pour cette jeune femme en prise avec le Penisneid infantile à partir de sa question concernant l’exclusion du père qui tourne autour d’une valeur concernant la possession du phallus. Cette hypothèse est confirmée par la manière dégradée dont le sujet voit son père et par la tristesse associée à la déflation de l’image phallique. L’image du père est la confirmation de sa logique négative. « On ne peut savoir dans quelle mesure la figure réelle du père se trouverait par là déchue et dans quelle mesure le sujet aurait accentué le trait défectueux et dès lors métonymique de la personne tout entière. En tous les cas, l’agent de la castration étant le père réel, le caractère absolu de la frustration imaginaire pourrait avoir fait en sorte que le sujet s’identifie à la faille du père réel*,[38] au sens où celui-ci serait perpétuellement pris en défaut »[39].

 

Nous pouvons mieux comprendre l’usage que Mlle M. fait des phonèmes. Cette utilisation reprend la valeur métonymique de la faille du père (libertinage) à laquelle elle s’identifie. Ses propres traits s’inscrivent ainsi sous le signe du phallus. Ce ne sont pas ses yeux ni ses lèvres qui sont l’équivalent du phallus mais l’image de ceux-ci pour autant qu’ils reflètent quelque chose de cette faille cernée par ces signifiants. Or la faille du père  semble être clivée. Dans le vide deux valeurs phalliques peuvent s’insérer alternativement : avoir ou ne pas avoir le phallus. C’est à partir de cette alternance que Mlle. L. semble  construire son symptôme.

 

Un symptôme vacillant

 

Nous avons remarqué que le refoulement du signifiant W chez l’Homme aux loups  permet le surgissement du Witz : Espe. Si le refoulement du signifiant age chez Mlle. M. fonctionne d’une manière analogue à la lettre W, nous sommes en droit d’attendre sa participation dans la structuration du symptôme, non plus dans son contexte métonymique, mais comme métaphore.

 

Une des préoccupations de Mlle M. est son idéal du mariage. Nous avons dit que son premier mariage s’est soldé par un échec dû, selon elle, à la stérilité de son propre mari. Sa position de sujet se reflète par le fait qu’elle prend à son compte l’histoire du couple parental, faisant un parallèle entre elle-même et les paroles de sa mère, par le biais d’un désir d’enfant.  Cette position n’est pas simplement une identification pure et simple à la mère. En effet, un paradoxe émerge dans le fait que Mlle M. n’évoque pas dans ce contexte ce qui semble être la cause de divorce de ses parents selon la mère : l’infidélité du mari. Elle fait le choix d’exprimer cette cause dans la notion : « pas d’enfant », illustrant par là la fonction phallique : avoir ou ne pas avoir le phallus.

 

Nous remarquons par cette construction que la valeur x de la fonction phallique touche à quelque chose au niveau de i’(a), l’idéal du moi, si bien que quand Mlle M. n’arrive pas à s’identifier à une des valeurs alternatives de la faille du père, (qui tourne ici autour des valeurs : avoir ou ne pas le phallus) au niveau de l’image il ne paraît plus que seulement l’objet a (l’horreur). Rappelons que c’est par cette faille que peut s’inscrire la métaphore paternelle dans des termes que nous avons repérés dans les paroles du sujet: ou bien, je suis une libertine, terme qui lui vaut le rejet maternel, ou bien, stérile, terme qui ne prend en compte que son existence contingente dans la parole du sujet, et non une stérilité avérée au sein du couple parental. Il s’inscrit cependant parfois dans une phrase qui vaut presque son propre effacement subjectif : « La stérilité a déclenché le divorce de mes parents ».

 

Selon Lacan, la distance entre l’identification à l’idéal du moi et la part prise par le désir de la mère, laisse l’enfant ouvert à toutes les prises fantasmatiques. Si cette distance n’est pas assurée par la médiation, l’enfant devient « l’objet » de la mère. Sa seule fonction devient la révélation de la vérité de cet objet. L’enfant réalise la présence de l’objet a dans le fantasme. Il sature en se substituant à cet objetle mode de manque où se spécifie le désir de la mère.[40]

 

Pour examiner ce point plus en avant, notons l’étrangeté de ces propos concernant la stérilité de ses parents. Cette phrase est très proche de celle d’un autre patient, qui, lui, psychotique, demande : « Est-ce que j’étais déjà dans le ventre de ma mère quand mon père est mort ? », illustrant la forclusion du Nom-du-père. Or Mlle M. étaye sa phrase par l’association avec sa propre expérience, ainsi qu’avec une sorte de vaillance en étroite identification avec la mère.

 

Malgré ce resserrement, il y a un rapport qui reste avec un tiers objet, le phallus, par le biais de l’enfant, puis par le maquillage. Le signifié du désir maternel (qu’on peut penser se rattacher au regard du petit cochon, à l’excrément dans la couche,  au sexe de l’enfant…) s’articule avec les signifiants concernant le phonème age(trait unaire). La métaphorisation de ces termes intervient autour d’un signifiant qui s’entend par l’énonciation de stérilité, un « pas d’enfant » qui peut également s’énonçait par la notion de mariage, de  libertinage, de maquillage…Or, la référence au temps arrêté : le tatouage, tu as tout âge, semble gagner du territoire par intermittence.

 

Au cours d’une période où elle est en plein préparatif pour son deuxième mariage, elle a été hospitalisée suite à un geste suicidaire par prise d’anxiolytiques après une rencontre avec des amis. Elle raconte ce qui l’a poussé à ce passage à l’acte qui n’a pourtant pas mis ses jours en danger.

 

« Mon ami m’aime vraiment. Il veut avoir un enfant. Le problème est que je souffre par rapport à ce physique…Je suis trop jalouse. S’il y a quelques jolies filles autour de moi, autour de nous, j’ai envie de me sauver. Je pars. Je ne les supporte plus. Hier soir en rentrant, j’avais envie de rompre avec mon ami… C’est après l’acte sexuel avec mon ami que j’adore, que j’ai pensé à me suicider. Je voulais arrêter de lui gâcher la vie, de gâcher sa vie à lui. Je suis exécrable. »

 

En ces moments de tristesse, il y a tantôt une tentative de s’identifier au phallus où elle évoque encore ce trait unaire : age, tantôt une jouissance Autre. 

 

« Je n’arrive plus à être gaie. Je voudrais  qu’on me trouve en robe de mariée avec des fleurs. Quelque chose de très, très beau. Suicide ou mariage avec mon ami, je veux que ça soit beau. Je ne veux pas un suicide banal. Je veux que ça soit beau. C’est la meilleure chose qui puisse m’arriver. Je ne veux pas que ma mère souffre. C’est comme pour le mariage avec mon ami. Je veux qu’elle l’interprète comme ça. Je ne vais pas louer la salle des fêtes. Ce n’est pas un drame. C’est sûr que ça marque. Je ne veux pas que ça soit pour elle une mort, un voyage sans retour, qu’on a eu une fille et on l’a perdue, quoi. »

 

Le réel se noue au symbolique dans ce tissage du part précieux avec le rien pour en faire à la fois la fille qu’on n’a pas eue et la fille (qu’on aurait) perdue. Mlle M. évoque ainsi des sentiments de culpabilité à l’égard de son désir d’enfant et à l’égard de sa mère.

 

Ce sentiment touche à ce qui fait une jouissance « Autre », une jouissance non phallique, une jouissance hors temps. Tour à tour, elle se punit et elle se cache du regard réprobateur (d’elle-même déjà) sous une couche de maquillage. Or, c’est par cette deuxième valeur phallique, la stérilité,  que Mlle M. peut rester solidaire à la position maternelle, et, manquer de former un couple assez stable pour avoir elle-même un enfant, tout en s’identifiant à son père.

 

La position hystérique devient de plus un plus claire. Si pour elle l’homme stérile ne peut avoir le phallus qu’à condition d’être libertin, elle-même doit se muer en libertine pour cacher son manque au risque d’être rejetée par sa mère. Ainsi elle devient une sorte de Casanova féminin pour être elle-même désirée comme une femme. Quant à son désir d’enfant-phallus par lequel elle prétend avoir voulu « rassurer » son mari stérile «  en vue d’une adoption » (obtenir quelque chose qu’elle n’a pas), tantôt elle prétend avoir le phallus, tantôt elle est châtrée.

 

Dès qu’elle évoque le sujet de l’adoption, où la notion de désir d’enfant vient au premier plan, elle parle de malaise. Elle parle des jolies femmes autour d’elle.  Ne cherche-t-elle pas, chez ces dernières, le modèle de sa propre féminité pour faire semblant d'être le phallus ? Leur évocation suscite des idées de mariage pour s’assurer sa place auprès de son ami, puis de suicide pour garantir son manque à être.

 

Cette position n’est pas simplement une répétition du conflit parental dans une édition « comme si » que nous connaissons pour la psychose. Elle provoque une malaise, une « malaise à être »  malaise à être à la place du phallus, pouvons nous dire, suite à l’intervention de sa mère, qui lui convainc de quitter son mari. Son ordalie commence avec cette confusion de places qui ne lui convient pas, et pour cause, elle redevient l’enfant, le phallus désiré, même idéalisé de sa mère (place de l’idéal du moi dans le schéma R de Lacan). Pour ne pas rester dans une place de fétiche, elle s’identifie au père. Comme Dora elle soutient la faille de son père.[41] Elle se prend ainsi comme cible des reproches maternels, se traitant de libertine, comme sa mère a jadis fait avec son père, refoulant ce signifiant, trait unaire, le pas d’enfant (la stérilité), qui circule entre les parents.

 

Chaque fois que le sujet se fait belle, pour déguiser son manque, tendant à montrer que c’est bien elle qui a le phallus, elle est saisie d’une angoisse de l’être réellement. Ses injures devant la glace ne sont-elles pas des mesures fantasmatiques par lesquelles elle se fait objet de regard, objet de vengeance œdipienne ? Ces scènes évoquent une sorte d’envers de la Belle au Bois Dormant où la Belle demande au miroir qui est la plus belle.  Ses injures se déclinent dans des reproches équivalents à ceux qui sont adressés au père mais qui ont aussi l’avantage de l’enlaidir. Elle se maquille pour ne pas présenter sa castration à son compagnon qui, lui, désire. La détumescence du pénis après l’acte sexuel la laisse avec les idées de suicide, d’identification à l’objet perdu (le pas d’enfant), qui signale un retour de la libido sur le moi[42] mais aussi la rencontre avec la castration par l’intermédiaire de son partenaire. Le sujet devient ainsi pur objet de regard, dangereux pour les autres.

 

Remarquons aussi comment la patiente interprète l’écœurement de sa mère. Celle-ci est tantôt  écœuréepar le libertinage de son père tantôt par le contact avec les excréments. C’est encore elle que le sujet tend à protéger par une couche de bébé qui se remplace par une couche de maquillage. Elle se fait cochon pour être désirée par des femmes mais elle ne peut se faire désirer par sa mère qu’en devenant objet, phallus, cadavre même. Suicide ou mariage avec son ami, elle veut que l’événement marque (castre) sa mère, que cet événement soit beau. Elle conjugue  la castration maternelle à la scène primitive : en privant sa mère d’une fille, elle lui offre le « pas d’enfant » désiré (désir d’un désir insatisfait hystérique pour la mère). Ce « pas d’enfant » (ou un inconnu ayant cette valeur) peut être le signifiant du sujet ou un signifiant où se conjugue le signifiant maître age, le constant phallique. Le symptôme constitue un nouage qui aboutit à un sens, une métaphorisation. L’enfant qui n’est pas conçu, n’a pas d’age, n’empêche qu’il pourrait être inscrit dans la parole des parents. C’est bien ce qui semble faire problème pour Mlle M. N’adhère-t-elle pas à cette place d’enfant imaginaire ? Cette conjugaison fait intervenir une privation réelle qu’elle tend à esquiver par le biais du maquillage.

 

Nous pouvons mieux comprendre l’usage que Mlle M. fait des phonèmes. Cette utilisation reprend la valeur métonymique de la faille du père (libertinage) à laquelle elle s’identifie. Ses propres traits s’inscrivent ainsi sous le signe du phallus, le pas d’enfant, représenté par le symptôme du libertinage. Ce ne sont pas ses yeux ni ses lèvres qui sont l’équivalent du phallus mais l’image de ceux-ci pour autant qu’ils reflètent quelque chose de cette faille cernée par ces signifiants. Le maquillage est le seul écran contre le  retour du signifiant réel, le phonème age, à la place de la représentation, le pas d’enfant. Imaginons une image, photo où le sujet s’efface parmi les siens parce qu’une intervention dans l’avenir aurait empêché sa naissance dans le passé. [43] Nous avons là un exemple de comment la castration ainsi que le temps interviennent de à travers le signifiant phallique. Or chez le sujet, cette question d’êtren’intervient pas suite à des modifications du temps mais suite à la vacillation de la valeur de la représentation qui fait nouage. Tantôt ce nouage « tient », tantôt, il semble se délier faisant place à un manque à être difficile à supporter. 

 

Les images, du visage non maquillé se rapprochent par leur fonction à des formations de substitut phobique. Elles accomplissent à la fois une substitution imaginaire à l’objet phallique et un démenti par rapport à la réalité. L’objet imaginaire de la castration, l’objet phobique (ici une image) se substitue à l’objet réel de la frustration (le phallus réel). Le sujet s’esquive, par cette entremise, de la privation où il y a un trou réel (l’objet a). Le maquillage, dans ces cas, peut servir à voiler l’objet a, protégeant l’Autre ainsi de l’horreur dans les moments où les formations symboliques ne tiennent plus leur fonction de nouage. La solution que propose Mlle M.,  le tatouage, n’est-il pas pour elle une solution  sintomatique  possible dans le sens celui-ci marquera le corps des signifiants noués à son image et inscrirait la castration en même temps que son voile sur le visage ? Ainsi le sujet pousse l’analyste aux limites de son art. Là où le symptôme ne se prête pas à l’interprétation, il ne peut que laisser la coupure à la charge de son  patient.  

 

Barbara Bonneau

 

Le 6 Octobre 2004©

 



[1] Ce terme vient du psychiatre italien, Enrico Morselli en 1891 « « Sulla Dismorfofobia et Sulla Tafefobia due forme nonper ance descritte di Pazzia con idée fisse.”  Morselli était un correspondant de Freud. A l’époque, les phénomènes psychiatriques étaient classés selon des catégories dans la même manière que les catégories biologiques. C’est-à-dire, ils étaient classés d’une manière dite « naturelle » selon la description d’une « fixation ».   Je garde le terme dysmorphophobie parce qu’à l’époque de ma rencontre avec un patient hospitalisé, ce terme était toujours en vigueur. Par ailleurs, ce terme a l’avantage de conserver la  notion d’angoisse ainsi qu’un concept de l’image.  Toutes les autres considérations concernant les points de vue ou les observations de Morselli sont hors de portée de ce texte.  D’autre part, à l’époque de son écriture, j’ignorais son travail.

[2] Ce texte a été utilisé pour support d’une intervention au  Séminaire de Lisa Muller et de moi-même à Beaune (FCL) le  4 Novembre 2006. Il est lui-même basé sur un extrait de ma thèse : BONNEAU, Barbara, Les mots dans l’œil, discours du schizophrène et son image du corps, étiologie différentielle des dysmorphophobies, Thèse de Doctorat, 2001. Voir pour une autre explication de la logique du Frege, l’excellent ouvrage de Geneviève MOREL, Ambiguïtés Sexuelles, Sexuation et psychose,  Anthropos, Paris 2000.

[3] L’expression de cette jeune femme ne signifie  t-elle pas le rôle  du symptôme pour Lacan  : quelque chose de vital pour le sujet.

[4] L’horreur qu’elle signifie, n’était-elle pas celle de l’objet a comme  regard.

[5] GAGNEBIN, Murielle, Fascination de la laideur, L’en-deçà psychanalytique du laid, 1978, Champ Vallon, Seyssel, 1994, p. 69.

[6] MAUPASSANT, Guy, « Le Horla » in Le Horla,  1887, Albin Michel, Paris 1984, p. 46-47.

[7] LACAN, J.,  « « Remarque sur le rapport de Daniel Lagache »: « Psychanalyse et structure de la personnalité » », 1958, in Ecrits, Paris, Seuil,  p. 676. 

[8] Ibid., p. 680.

[9] A ne pas confondre avec une position du « moi fort » de l’Ego psychology ou d’une identification avec l’analyste. Voir plus loin.

[10] LACAN, J. Les complexes familiaux dans la formation de l’individu, 1938, Paris Navarin Editeur, 1984, p.81. Ces insultes peuvent être considérées dans certains cas comme participant à des phénomènes du double.

[11] LACAN, J.,  Le Séminaire, Le Sinthome, Editions du Seuil, 2005, p. 144. « Ce qui reste, c’est le signifiant. Mais ce qui se module dans la voix n’a rien à faire avec l’écriture. Ça montre quelque chose à quoi on peut accrocher des signifiants. Et comment les accroche-t-on, ces signifiants ? Par l’intermédiaire de ce que j’appelle dit-mension. »

[12] Ibid., p. 678.

[13] RIVIERE, J., « La féminité en tant que mascarade, "Féminité 
Mascarade" », Études psychanalytiques réunies par Marie-Christine. HAMON, Paris,
 Seuil, coll. Champ freudien, 1994.

[14] FREUD, S., « Sur la sexualité féminine », 1931, in La vie sexuelle, traduit d’allemand par Denise Berger, Jean Laplanche, et collaborateurs, Paris, P.U.F., 1969, 1985, pp. 139-155.

[15] Rappelons que le père de la jeune fille homosexuelle a marqué le destin de sa fille en « donnant » un enfant à la mère de celle-ci lorsque la jeune fille commençait elle-même à avoir des aspirations maternelles.

[16] LACAN, J. Le Séminaire, IV, La relation d’objet, 1956-57, Editions du Seuil, 1994, p. 183..

[17] FREUD, S. Inhibition, Symptôme, et Angoisse, 1926, traduit de l'allemand par M. Tort, Paris, P.U.F., 1978. p.27.

[18] GAGNEBIN, M. Op. cit . p. 70.

[19] Ce signifiant retrouvé ici est seulement un hasard. Ces notions auraient pu être illustrées par d’autres phonèmes. Peut-être le fait d’avoir déjà travaillé sur ce signifiant chez l’autre malade  nous a conduit à être particulièrement attentif lorsque nous l’avons retrouvé.

[20] FREUD S., L’Homme aux loups, À partir de l’histoire d’une névrose infantile, 1914 [1918], traduit de l’allemand par Janine Altounian et Pierre Cotet, Paris, PUF, collection Quadrige, 1990, p. 92.

[21]« Subversion du sujet et dialectique du désir dans l'inconscient freudien », 1960, in Ecrits, Paris, Editions du Seuil, 1966, pp. 793-827.

[22] FREUD S., « Sur le mécanisme psychique de l’oubli », in Résultats, idées, problèmes, vol. I, Paris, P.U.F., 1984, pp. 99-107 et FREUD S., L’Homme aux loups (Souligné par nous) Op. Cit. p. 82-83.

[23] Ces cinq paragraphes précédentes sont extrait de BONNEAU, Barbara, “L’holophrase: repère de diagnostic ?”, Octobre 2003 in Revue de Psychanalyse du Champ Lacanien, Tout n’est pas Langage, Paris, Forums du Champ Lacanien, Ecole de Psychanalyse du Champ Lacanien, Mars 2004, repris sur le site www.Psychasoc.com depuis 2011.

[24] LACAN, J., Le Séminaire, Ou Pire, 1971.

[25] “L’holophrase: repère de diagnostic ? », op. cit.

[26] WINNICOTT, D. W.,    Jeu et Réalité, L’espace potentiel, trad. C. Monod et J.-B. Pontalis, Paris, Gallimard, 1971, p. 153.

[27] LAMBOTTE, Marie-Claude, Le discours mélancolique, De la phénoménologie à la métapsychologie,  Anthropos, Paris, 1993, p. 203

[28] Ibid.

[29] Ibid. p. 203.

[30] Ibid.

[31] Ibid. p. 203-204..

[32] Nous pensons ici à la fois au triangle commenté par Lacan et suivons M. C. Lambotte dans sa recherche concernant l’utilisation d’un objet esthétique par le mélancolique.

[33] Lacan parle de « barrière de lajouissance »  lorsqu’il introduit la nécessité d’une impuissancepour chacun de ses quatre discours. Lacan, J. Autres Ecrits, « Radiophonie », Paris, Seuil, 2001, p. 445-446. Soulignée par moi-même, « Dans le discours du maître, c’est le plus-de-jouir qui ne satisfait le sujet qu’à soutenir la réalité du seul fantasme » et plus loin, « Car l’impuissance n’est pas la guise dont l’impossible serait la vérité, mais ce n’est pas non plus le contraire : l’impuissance rendrait service à fixer le regard si la vérité ne s’y voyait pas au point de s’envoyer…en l’air. » Lacan articule non seulement la disjonction de la vérité et du savoir, mais aussi, indirectement,  celle du regard et de l’œil. Le plus-de-jouir est un autre nom que Lacan utilise pour l’objet a.

[34]  STEKEL, W., op. Cit. 146. « Le transfert, qu’il soit positif ou négatif, est extraordinairement puissant; il empêche toute imprégnation profonde (de découverte de soi). Tout se passe comme si le patient, grâce au transfert,  avait érigé une sorte « d’avant corps » affectif qui le met à l’abris de faits nouveaux, sur le plan de la connaissance. La relation au médecin devient plus importante que la guérison. L’affect n’est plus utilisé pour venir à bout du blocage de la connaissance de soi. ».  

[35] FREUD, S., "Le moi et le Ça", 1923, traduit de l’allemand par Jean Laplanche, in Essais de Psychanalyse, Paris, Payot, collection Prismes, 1987, p.238 et en note : « C'est-à-dire le moi est finalement dérivé de sensations corporelles, principalement de celles qui ont leur source dans la surface du corps. Il peut ainsi être considéré comme une projection mentale de la surface du corps, et de plus, comme nous l’avons vu plus haut, il représente la surface de l’appareil mental. »

[36]La question de technique analytique est ici épineuse. La place de l’analyste qu’a choisi Freud semble pourtant proche  de celle préconisée  par Lacan. C’est-à-dire, de sa place d’objet, Freud ne fait plus écran avec celui-ci. L’angoisse qui surgit devient particulièrement problématique par la suite. Ce n’est pas pour autant dire que Freud se trompe en se mettant à cette place. Les erreurs problématiques viennent quand il quitte cette place ainsi que celle où il pouvait intervenir comme avant corps. (Voir supra)

[37] LACAN, J. « La direction de la cure » in Ecrits, Op. cit.  p. 610.

*Souligné par nous.

[38] Notons que Ferenczi rapporte le cas d’une jeune fille hystérique ayant des symptômes hypochondriaques : la première explication qu’il propose est un rapport entre ces symptômes et une identification avec la pathologie du père. FERENCZI, S. « Psychanalyse d’un cas d’hypochondrie hystérique », 1919, in Psychanalyse III, Oeuvres, Complètes, trad. J. Dupont et M. Vilker, 1974, Paris, Payot, pp. 73-78.

[39] LAMBOTTE, Marie-Claude, Le discours mélancolique, De la phénoménologie à la métapsychologie, in op. cit., p.586.

[40] LACAN, J. Deux notes sur l’enfant, Ces deux notes, remises manuscrites par Jacques Lacan à Mme Jenny Aubry en octobre 1969, ont été publiées pour la première fois par cette dernière dans son livre paru en 1983. Edité depuis 2001 in LACAN, J. Autres Ecrits, « Note sur l’enfant », Op. cit.,  p. 373-374.

[41]FREUD, S. « Fragment d’une analyse d’hystérie (Dora) », 1909, traduit par Marie Bonaparte et Rudolphe M. Loewenstein in Cinq Psychanalyses, P.U.F., Paris,  1954, p. 59..

 

[42]Freud, S. « Deuil et mélancolie » 1915, traduction dirigée par Laplanche, J. et Pontalis J.-B., in Métapsychologie, Paris, Gallimard, collection Folio Essais, 1968, p.156.

[43] Zemeckis, Robert, Retours vers la future, 1985.