Engluement (à une faute) spéculaire







Cette fascination ou cette emprise par sa propre image en miroir chez les psychotiques ou chez les autistes a été particulièrement remarquée par la psychiatrie  autour des années 1930. A cette époque commençaient à paraître des études statistiques et descriptives qui visaient à dénoncer l’œuvre freudienne. Selon certains de ces auteurs, l’étiologie de ce qui est nommé désormais « signe de miroir » était clairement héréditaire. Ils insistaient sur une hérédité dégénérative.[1] D’une faute psychique  pour laquelle le sujet avait  sa part de responsabilité, la science venait poser son verdict : ce n’est pas le sujet qui est en cause mais son hérédité.

Le point de vue des psychiatres aliénistes était davantage lié  aux convictions de l’époque qu’aux dires des malades, et encore moins à des fautes réellement commises par ceux-ci. La faute a une dimension bien connue dans la psychopathologie, particulièrement chez ceux dont le symptôme a un aspect mélancolisé.Cependant, la consistance de la faute n’est pas pour autant évacuée avec le sujet quand l’hypothèse génétique est mise en avant. Désormais, l’hérédité néfaste ne sera plus du côté de l’imaginaire, tel que dans le mythe d’Œdipe. Elle est du côté du réel. Le schizophrène devient celui qui est né réellement d’une faute sexuelle. Et comme preuve de cette « dégénérescence », les auteurs évoquent les « tendances homosexuelles manifestes» qui sont considérées comme desdélits d’ordre génésique. Même le narcissisme tel qu’exposé par Freud perd son étoffe quand il se réduit à être« sous la domination de troubles spéciaux de la sphère sexuelle. » [2] La fascination dans le miroir devient alors le signe de tares héréditaires.[3]Toutes les pathologies présentant ce signe sont donc considérées à priori comme étant des schizophrénies.

Il semblerait que ces auteurs, parfois sensibles à la description des phénomènes chez les psychotiques,[4] n’aient pas complètement saisi ce qui constitue l’intérêt de leurs observations, ni au niveau de la constitution de l’image spéculaire psychotique, ni au niveau du sens que cet engluement dans l’image pourrait avoir pour le sujet. Un psychiatre constate l’apparition d’un comportement devant le miroir qui semble signaler dans un certain nombre de cas l’éclosion de la « démence précoce » (schizophrénie) ; il se préoccupe des « données » de la même manière que le ferait un statisticien.  Or, peut-on dire que le fait d’être captivé par sa propre image, appelé signe du miroir, signale l’éclosion de la schizophrénie ? [5]

Notons déjà que le terme de « signe » se rapporte à deux concepts sémiologiques assez hétérogènes. L’expression signe du miroir, aussi pertinente qu’elle paraisse, est utilisée par ces auteurs seulement comme un terme d’une sémiologie clinique faisant référence à la fascination du sujet pour sa propre image en miroir. Le signe ici a potentiellement pour vocation d’être une sorte d’indice (Anzeichen), terme qui se rapporte dans la tradition philosophique husserlienne au signe en tant que privé de Bedeutung[6]. L’utilisation du terme  signe du miroir ne reflète donc pas la portée d’un signifiant verbal s’articulant avec l’image que nous avons décrit, ni l’effet d’un signifiant. En évitant de signaler la portée éventuellement phénoménologique, le terme de signe rate aussi sa vocation illustrative de l’indice husserlien.  Ce terme n’expose pas non plus l’habillement de la jouissance tel qu’il est décrit dans une des théories de la psychosomatique, comme écriture présignifiante qui part du corps pour laisser des traces sur la feuille (ici le miroir). Cette expression n’a pas pour vocation de tenir compte de la notion d’une hétérogénéité, linguistique ou autre, qui à travers le signe véhicule à la fois le sensoriel et le compréhensible de par sa division potentielle en signifiant et signifié. Elle ne définit donc même pas un être-indice (Anzeichensein), concept large au sens husserlien (repris par Derrida), puisque ce signe ne se présente pas comme ayant la propriété d’un possible tissage (Verflechtung) avec  le sens de ce qui est vu dans le miroir (comme le Phallus au sens lacanien),  et encore moins comme s’articulant avec le signifiant du sujet. Pourtant, ce signe est défini comme ayant une propriété : le signe de miroir est considéré par ces auteurs comme étant « signe de » quelque chose, (même s’il s’agit de quelque chose qui n’est lisible que par des spécialistes). Ainsi, est-ce que ces spécialistes ne ratent pas de cette façon leur propre vocation en réduisant la problématique du miroir à une fonction quasi statistique ?    

Ici, les précisions lacaniennes concernant l’écriture, et plus particulièrement l’écriture scientifique, se révèlent précieuses. Le signe n’est pas pour Lacan « signe de » quelque chose : par exemple de la fumée qui signifie  la présence de l’homme qui fume ou autre chose. Le signe, pour Lacan, perd son sens en devenant un effet qui est ce qui se suppose dans un fonctionnement du signifiant. Quand il s’agit du sujet (ou de son image), cet effet est le sujet comme effet d’un signifiant. Cet effet de signifiant est ce que la psychanalyse nous apprend à distinguer de ses effets de signifié.[7] Cette distinction est donc absente chez ces auteurs aliénistes. Leur définition sémiologique, si valable soit-elle, ne pourrait que se transposer dans le domaine d’une écriture scientifique où la notion de signifiant est foncièrement absente. Encore faut-il que ce signe se déduise immédiatement de son écriture comme dans une équation mathématique, ce qui n’est évidemment pas le cas pour le signe du miroir qui peut se présenter aussi bien dans les névroses que dans les psychoses. 

Le terme « signe du miroir » n’a pas plus de rapport avec le stade du même nom qu’il n’en a avec la notion d’image pré-spéculaire. [8] Cette expression désigne exclusivement pour ces auteurs ce qu’ils appellent un « symptôme »[9], celui  d’une éclosion pathologique dans le cas de la schizophrénie, qui peut avertir les familles ou les médecins d’un pronostic gravissime pour le sujet en question. Ainsi, il me semble que son utilisation au niveau du diagnostic est circonscrite, ne se limitant  ni à la schizophrénie, ni aux psychoses.A l’époque encore plus qu’aujourd’hui, la distinction entre la psychose et la névrose était floue. On trouve ainsi dans la littérature psychiatrique des concepts tels que la psychose hystérique ou la névrose schizophrénique sans savoir toujours ce que l’auteur entend par ces expressions.Il me semble donc évident que l’utilisation de l’expression « signe du miroir » doit être faite avec prudence. Elle est inadéquate pour définir une pathologie, autant pour le psychanalyste que pour le médecin. Le langage sémiologique n’explique en lui-même que peu de choses. Le praticien doit se garder d’être séduit par la capacité suggestive de ces termes, et aussi se rappeler qu’une observation d’un trait, aussi remarquable soit-il, ne suffit pas à expliquer l’étiologie.

On comprend mieux alors pourquoi la notion d’une hérédité et même d’une sexualité « fautive » étaient évoquées par les psychiatres qui n’avaient à cette époque qu’une connaissance rudimentaire de la génétique. L’idée de la faute est par essence imbriquée dans la langue, et de fait dans la culture. N’ayant pas pu lier la préoccupation des sujets  pour leur image au système des signifiants propre à chaque sujet, ils associaient le fait d’être captivé par le miroir aux valeurs normatives ambiantes. 

 Depuis longtemps on avait constaté une attitude dite homosexuelle chez certains patients psychotiques ; la préoccupation devant le miroir semblant avoir été plus souvent remarquée chez les patients masculins que chez les sujets féminins. [10] Ces préoccupations narcissiques ont été relevées par Freud dans le texte de Schreber où celui-ci parle longuement de sa transformation en femme, et  pour lequel Lacan désignera un processus de « pousse-à-la-femme ». [11] Freud mettra en parallèle la question du narcissisme avec celle d’une homosexualité latente chez le paranoïaque, à partir de la notion d’identification. Il rapprochera ainsi les deux phénomènes : la tendance homosexuelle et le narcissisme. Les concepts d’identification et de narcissisme lui permettront d’étudier également   les phénomènes de double dont il sera question plus loin. On remarquera que dans la réflexion freudienne, la dimension imaginaire est mise à jour à partir d’une étude sur le discours du malade autour de son image, ce qui implique la prise en compte à la fois des éléments  sensoriels et des éléments de compréhension.

La question de l’identification est propre à la dimension imaginaire. Cette dimension, dans laquelle la question sexuelle ainsi que la notion de faute sont pourtant prégnantes, n’est pour autant ni soumise à l’hérédité ni à des bouleversements endocriniens.[12]

Admettons qu’il soit possible que certains sujets décrits par les psychiatres comme des schizophrènes soient en réalité des sujets atteints de troubles chromosomiques tels que ceux observés dans les syndromes qui affectent le nombre de chromosomes sexuels, par exemple le syndrome de Klinefelter. L’expression déficitaire et les troubles de la sexuation étant dans ces cas effectivement d’ordre génétique, il découle très souvent de cette pathologie des problèmes d’identité et d’expression sexuelles. Or, l’articulation  non seulement au regard mais aussi à la parole place le sujet dans une dépendance vis-à-vis du désir de l’Autre, de sorte que la virilité comme trait fort de l’identification  échappe à la dépendance aux attributs sexuels réels pour être solidaire du désir.

Une pathologie génétique, même patente, et qui atteint la sphère sexuelle, ne suffit  pas à déterminer l’image de soi. L’identité sexuelle se construit à partir des imagos parentaux véhiculées par la langue, et elle n’est pas  dépendante de la sexuation. Amener le narcissisme dans la sphère génétique  relègue le sujet à une place d’objet et évacue d’emblée sa capacité de structuration identificatoire.

Considérons, pour saisir par ailleurs l’importance de cette influence de l’entourage, les remarques de cette fillette de neuf ans qui présente une dysmorphie faciale d’ordre congénital. Sandrine ne semble pas se préoccuper de son apparence. Cependant, à sa naissance, les interventions chirurgicales pour assurer sa survie ont été si nombreuses qu’une véritable inquiétude s’est instaurée autour de son accueil. Voir leur nourrisson avec des bandages et une sonde fut une dure épreuve pour les parents de Sandrine. Une partie de l’inquiétude de la mère quant à ses propres problèmes de santé, non pris en compte comme pouvant avoir des effets sur le fœtus, se déplacera petit à petit sur sa fille, même lorsque celle-ci ira bien. La mère se tiendra pour responsable de ce qui est arrivé à sa fille ; le père supportera très mal les soins prodigués à l’enfant. Le couple parental ne tiendra pas le choc.        

Pendant environ cinq ou six ans, le désir de la mère de chirurgie esthétique pour sa fille deviendra une obsession ; elle dira qu’elle avait  peur que sa fille soit rejetée par les enfants de l’école. Après des entretiens pour parler des possibilités de « corriger » quelques aspects de son apparence, Sandrine, enchantée, proclamera : « Comme ça, on peut opérer mon sexe. Je veux être un garçon. Je ne veux pas des gougouttes (les seins) » ! Comment entendre cette demande de changer de sexe formulée à ce moment-là si l’on n’a pas l’idée  que cette petite fille est aux prises avec une revendication phallique identificatoire, avec des angoisses attachées à la maternité qui dépassent de loin sa demande  de réparation de son apparence physique ? 

Chez le schizophrène, ne doit-on pas là aussi tenter de mettre en lien le discours avec les phénomènes délirants ou l’activité devant le miroir ? Où est la place du sujet ? D’où viennent ses demandes ? Quel « sens » peuvent avoir ses symptômes pour lui ? Qu’est-ce que le malade trouve  ou retrouve dans le miroir ? [13] La question de l’absence et la question d’une opposition dialectique originaire me paraissent aussi fondamentales que la question de faute sexuelle ou autre.

Est-ce que l’engluement spéculaire ainsi que d’autres pratiques corporelles peuvent être considérés comme paradigmatiques de la schizophrénie ? Je considère que la fascination spéculaire, illustrée aussi par l’acte de se maquiller et se remaquiller pendant des heures, ou de lancer les volutes de fumée contre la glace de façon persistante, démontre comment le modèle imaginaire du miroir est insuffisant pour comprendre la schizophrénie. On verra plus loin que ces pratiques corporelles ont pour chaque patient un lien spécifique dans lequel le miroir joue un rôle, insuffisamment explicité dans de nombreuses études, alors que  la prise en considération de  ce lien spécifique aurait été fort utile pour pouvoir établir un diagnostic de schizophrénie. En effet, ces pratiques corporelles seules ne sont pas spécifiques à cette pathologie.

Néanmoins, dans la schizophrénie et dans l’autisme, le miroir n’est pas celui de l’identification ou celui de la reconnaissance d’une instance imaginaire comme on pourrait être tenté de le croire, mais celui d’une instance réelle où le malade tente désespérément de donner du sens à son vécu à partir du symbolique. L’image en miroir est liée au signifiant, ce qui l’amène dans l’arène du concept d’ « expression » (Ausdruck).[14]Dans ce sens, le signe est à envisager en relation avec saBedeutung,c’est-à-dire avec sa signification, même si pour le malade le « sens » de ce qu’il voit lui échappe. Les deux axes du langage définissent donc le rapport du signe avec sa signification, même si comme pour le regard, ceux-ci semblent manquer parfois d’un écart suffisant pour voir et pour comprendre. De ce point de vue, ce qui est visé dans la relation du sujet à son image est ce qui est visé dans toute relation d’amour. C’est le sujet en tant qu’il s’articule et s’ordonne au signifiant.

Au-delà d’une constitution génétique qui pourrait être à l’origine de la schizophrénie, les aliénistes ont abordé la schizophrénie  en l'orientant vers une dégénérescence liée à la notion  de faute sexuelle. Le signe du miroir devient alors signe de faute. Pour Sandrine, la dysmorphie avérée est devenue pour la mère un signe de son propre manquement, malgré les explications médicales d’un possible syndrome génétique. On a vu comment certains patients comme Mlle M. lient leur dysmorphophobie à une faute de cet ordre. Dans ce cas, il s’agit d’une faute imaginaire. Dans le cas de Michel L, il s’agit d’un élément qui fait retour du réel et qui prend appuie sur des éléments ‘massivement symboliques’. Tantôt il est pris dans un versant mélancolique où il s’accuse d’être l’auteur des crimes incestueux, tantôt il se dit issu d’un viol. Les croyances des malades abondent dans le sens des aliénistes. L’image du malade ne reflète-t-elle donc pas une faute ?

Les psychanalystes se sont fait souvent reprocher leur zèle pour trouver une étiologie où les fautes des parents seraient mises en exergue. Or, on aurait tort de penser que derrière les études axées sur la recherche génétique cette dimension ‘fautive’ est éliminée. Ce fait est lié à la configuration de la chaîne symbolique et à l’organisation de celle-ci par rapport au renoncement pulsionnel.  L’approfondissement de cette dimension de faute en lien avec des perturbations dysmorphophobiques est intéressant dans cette étude pour autant qu’il explique un élément de cette expression pathologique. Néanmoins, cela peut égarer. Cet aspect explique quelque chose de l’expérience du malade et du désir de ses parents. En effet, la question qu’il faut se poser concerne l’usage que fait le sujet, à la fois de ses ‘fautes’  et de la construction de celles-ci.  

 

Barbara Bonneau

 

Extrait de la version juin 2004 du Les Mots dans l'oei, jeux de la vérité de l'être speculaire, proposé comme intervention aux journées de l'EPFCL. Voir Dépôt  légal sur ce site. 

 

 

[1]P. Abley, « Le signe du miroir dans les psychoses et plus spécialement dans la démence précoce », 1930, inSociété psychologique, Annales médico-psychologiques, Paris, Fortin, Vol. 1, pp. 28-36.Abley détaille une trentaine d’observations où  des patients  s’examinent le visage et/ou le corps, longuement et fréquemment devant une surface réfléchissante.p. 29-30. Le concept de la dégénérescence est lié au darwinsisme, non pas aux théories de Darwin lui-même mais à certains de ses héritiers qui ont voulu expliquer les différences de races par la théorie de l’évolution.

[2]Ibid. Souligner par moi.

[3]Ibid., p. 35-36.           

[4]A la différence de Stekel qui conseille au clinicien, rappelons-le, de ne pas entreprendre un travail thérapeutique avec ces patients. W. Stekel,  Technique de la psychothérapie analytique,  op.cit., pp.144-146.

[5]P. Abley  « Le signe du miroir dans les psychoses et plus spécialement dans la démence précoce », in  op.cit. .

[6]Note après 2004 : c’est-à-dire comme privé de sa signification,  phallique selon Lacan.  Pour Lacan, n’est-ce pas la signification qui produit la vérité  comme effet, qui suppose aussi un fonctionnement du signifiant ? Selon Derrida, Husserl dans son texte l’Origine de la géométrie « accordera une attention croissante à ce qui, dans la signification, dans le langage et dans l’inscription consignant l’objectivité idéale, produit la vérité ou l’idéalité plutôt qu’il ne l’enregistre. » J. Derrida,  La voix et le phénomène, Introduction au problème du signe dans la phénoménologie de Husserl. PUF, Collection Quadridge, 2003, p. 26 (Souligné dans le texte).

J. Derrida,  Ibid.  Le point de vue de Derrida diffère de Lacan de façon importante. Bien que la signification « produise » la vérité,  celle-ci n’est pas une équivalente de « l’idéalité » pour Lacan.  Derrida ne soumet pas lui non plus le signe à la vérité, subjective ou autre. Pour Derrida, le signe peut «incarner » la vérité, et non seulement « la reproduire ». Il pose la question : « Le signe n’est-il pas une autre chose qu’un étant, n’est-il pas la seule « chose » qui, n’étant pas une chose, ne tombe pas sous la question « qu’est-ce ? »p. 26.  La vérité (la Wahrheit) pour Lacan et celle dont je m’occupe ici est la « vérité du sujet » qui se situe  du côté de la jouissance.  L’idéalité s’approcherait plus pour Lacan non pas d'une forme de « certitude », leGewissheit,mais plutôtGewissen qui se situe plus du côté du savoir ou de la conscience morale (même s’il ne pense pas que nous puissions l’atteindre).

[7]J. Lacan,  Encore,Le Séminaire, Livre XX, Encore, 1972-73,texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1975.

[8]« J’ai tué mon père et je suis dans la glace », articulation entre le rejet du signifiant primordial et l’image spéculaire, Observation d’une dysmorphophobie. Op.cit. La notion d’image pré-spéculaire est utilisée par Marie-Claude Lambotte in  M.-C. Lambotte,  Le discours mélancolique, De la phénoménologie à la métapsychologie,  Anthropos, Paris, 1993 pp. 245-277, pour définir un temps vers lequel semble tendre le mélancolique. L’image pré-spéculaire ne correspond pas à  une image spéculaire unifiée ; ce terme désigne néanmoins une image.

[9]P. Abley,  « Le signe du miroir dans les psychoses et plus spécialement dans la démence précoce » in  op.cit., p. 28.

[10]Ibid., p. 29.

[11]J. Lacan,  « L’Etourdit » (1972), Scilicet n°4, Paris, Seuil, 1973, p. 22.Pour Lacan cette attitude n’est ni celle de la femme  ni même celle d’une manifestation d’un retour dans le réel d’un rejet de l’amour homosexuel, désignée par Freud, mais plutôt une manifestation de la forclusion de la castration maternelle.

[12]Paul Abley, « Le signe du miroir dans les psychoses et plus spécialement dans la démence précoce » in  op.cit., p. 36. « Ces malades sont habituellement des Narcisses qui évoluent vers des tendances homosexuelles. Ce narcisse et ces tendances peuvent être constitutionnelles ; plus fréquemment, elles sont acquises et apparaissent à la faveur d’un bouleversement endocrinien lié à une cause toxique. »

[13]Voir supra.

[14]              Note ajouté après 2004 : J. Derrida dans La voix et le phénomène, Ibid., p. 17, explique le point de vu de Husserl : « Husserl commence par dénoncer une confusion : le mot « signe » (Zeichen) recouvre, toujours dans le langage ordinaire et parfois dans le langage philosophique, deux concepts hétérogènes : celui d’expression (Ausdruck), qu’on  tient souvent à tort pour synonyme de signe en général, et celui d’indice (Anzeichen).Or, selon Husserl, il est des signes qui n’expriment rien parce qu’ils ne transportent…rien qu’on puisse appelerBedeutungou Sinn.  Tel est l’indice. Certes, l’indice est un signe, comme l’expression. Mais, à la différence de cette dernière, il est, en tant qu’indice, privé de Bedeutung ou de Sinn :bedeutungslos, sinnlos. » Or Derrida explique une difficulté de traduction. En Allemand il est possible de dire qu’un signe est privé de signification tandis que pour Derrida, en Français il est impossible de dire qu’un signe est privé de signification. Quant à Lacan, il insiste sur le fait que la signification, pour laquelle il maintient le terme Allemand (Bedeutung),est toujours phallique, c’est-à-dire qu’en l’absence de la barre, le signe est toujours associé à une signification et le signifiant avec un signifié (ce qui est le cas pour Husserl même si cette « essence » se perd dans la traduction).